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Les News

Avril 2017

1/1 Surveillance des océans, mesures in-situ, programme Argo et NAOS

Lancé en 2000 par la Commission océanographique intergouvernementale de l'Unesco (COI) et l'Organisation météorologique mondiale (OMM), le programme Argo avait pour objectif de développer et maintenir un réseau global de 3000 flotteurs profilants mesurant en temps réel la température et la salinité des océans depuis la surface jusqu'à 2000 m de profondeur. Cet objectif a été atteint en 2007. En avril 2017, le réseau comprend un peu plus de 3900 flotteurs.

Carte des flotteurs Argo

Carte des flotteurs Argo actifs. Source Argo.

Issue d'une coopération très réussie entre plus de 30 pays, ce réseau unique d'observation globale in-situ des océans, complément indispensable des observations satellitaires, a permis de mettre en oeuvre la démarche : "observer, comprendre, prévoir" pour préciser le rôle de l'océan sur le climat.

Cette série d'observations a permis des avancées remarquables dans la représentation par des modèles numériques de l’océan, nécessaires à la prévision océanique et climatique saisonnière. Les données sont systématiquement utilisées par les systèmes mondiaux d’océanographie opérationnelle (NOAA, Jamstek au Japon, BOM en Australie et Copernicus Marine Service coordonné par Mercator Océan en Europe) et leurs applications.

Il a aussi contribué à améliorer l'estimation de la chaleur stockée dans les océans, à mieux comprendre l'élévation globale du niveau des mers, et à analyser les variations de la circulation océanique et des zones de convection profondes. Ces mesures ont également montré des changements dans la salinité qui suggèrent une amplification du cycle hydrologique.

Compte tenu de sa contribution éminente notamment pour l'étude du changement climatique, le réseau ARGO doit, d'une part être pérennisé, et d'autre part étendre son champ d'observation.

En effet :

Dans ce but, un renforcement de la coopération internationale est apparu indispensable. La France a pris dès 2011 les dispositions pour y prendre part. Il s'agit du projet NAOS (Novel Argo Ocean observing System) mis en place pour une durée de 9 ans.

Depuis le début du programme Argo, la France a été leader de l'effort européen pour cette infrastructure mondiale. La consolidation sur le plan administratif est intervenue en 2014 avec la mise en place d'une structure légale Euro-Argo ERIC (European Research Infrastructure Consortium), qui organise et fédère les contributions européennes à Argo et dont le siège est localisé en France à Brest.

Quels sont les objectifs du projet NAOS ?

Cinq secteurs d'activité ont été confiés à cinq groupes de travail avec des objectifs bien précis :

  1. Renforcer la contribution française au réseau Argo

    L'objectif est de maintenir et améliorer le réseau Argo pour les prochaines décennies. C'est un élément clé, les scientifiques ont besoin de données pour poursuivre leurs recherches afin de surveiller la planète, poursuivre l'amélioration des connaissances du rôle de l'océan sur le climat. Ils doivent aussi comprendre et prévoir les implications environnementales et sociétales.
    La priorité est donc de renforcer la contribution française et européenne au réseau international Argo par le déploiement de flotteurs supplémentaires sur la période de 2012 à 2019 (actuellement, chaque année, 800 à 900 nouveaux flotteurs sont déployés, pour maintenir le réseau de flotteurs actifs à son niveau actuel, leur durée de vie moyenne étant de 3 à 4 ans).

    Flotteurs ArvorIl s'agit de flotteurs Arvor développés par l'Ifremer et industrialisés par la société NKE. Avant 1994, l'Ifremer avait étudié une première génération de flotteurs Marvor mis en oeuvre dans les campagnes océanographiques. Puis vers 1997, des besoins nouveaux de flotteurs dérivant étant apparus, le profileur Provor héritier de Marvor a été mis au point.
    Ces appareils sont utilisés de la façon suivante : après un séjour de deux semaines à la profondeur de 1000 m, le flotteur descend jusqu'à 2000 m, puis remonte jusqu'à la surface pour transmettre les mesures effectuées. On récupère ainsi deux fois par mois le courant moyen à 1000 m ainsi que des profils de température et de conductivité (dont on déduit la salinité).
    Enfin, pour le programme Argo a été développé un profileur Arvor plus léger et plus facile à mettre en oeuvre que le Provor, exclusivement dédié à la mesure de température et de salinité. Les profileurs Provor étant plus volumineux, peuvent plus facilement être équipés de capteurs optiques et sont utilisés maintenant pour les besoins de mesure de l'oxygène dissous et d'autres paramètres biogéochimiques.

  2. Développer la nouvelle génération de flotteurs Argo

    Il s'agit de développer de nouveaux outils d'observation et les évolutions instrumentales répondant aux besoins d'Argo pour les 10 années à venir. Les nouveaux flotteurs seront plus intelligents, plus fiables, moins coûteux et économes en énergie. Ils seront aussi capables d'embarquer de nouveaux capteurs permettant d'élargir la gamme de mesures (en particulier pour la biogéochimie : oxygène, chlorophylle-a, nitrate, carbone), et d'aller vers les plus grandes profondeurs (jusqu'à 4000 m). Certains disposeront aussi de nouvelles capacités de transmission par satellite, Argos-3 et Iridium.

  3. Flotteurs avec capteurs biogéochimiques en Mer Méditerranéenne

    La Méditerranée est une des mers les plus impactées par la pression humaine et par le changements climatique, d'où l'importance de disposer de moyens d'observations et de données scientifiques. Ce programme permettra de mettre en place le premier réseau d'observation robotisé des écosystèmes marins et d'avancer dans la compréhension des dynamiques des écosystèmes en Méditerranée.

  4. Flotteurs avec capteurs biogéochimiques en Arctique

    Le changement climatique a provoqué des modifications considérables des biotopes marins dans l'Océan Arctique. La diminution de l'étendue de la banquise durant l'été a entraîné une augmentation de la production primaire au cours de la dernière décennie. Les écosystèmes marins sont impactés par des perturbations liées à la couverture de glace, la lumière, les nutriments et la température. Les flotteurs seront déployés dans les zones de glace saisonnière.

  5. Flotteurs profonds avec capteurs d’oxygène en Atlantique Nord

    Des flotteurs profonds (au delà de 2000 m) permettent de disposer de données nouvelles apportant une meilleure estimation du rôle de l'océan dans l'élévation du niveau de la mer. L'existence de capteurs d'oxygène apporte des éléments nouveaux sur la concentration en oxygène dans l'océan, sur la dynamique océanique, les écosystèmes et le cycle du carbone. Les séries de données sur la température, la salinité et les concentrations en oxygène dissous permettront d'étudier la variabilité de la convection profonde, des propriétés des masses d'eau, de la circulation océanique et la réponse biogéochimique à ces changements.

Où en est-on ?

Renforcement de la contribution française au réseau Argo

Entre 2012 et 2015, 67 flotteurs (Arvor) mis en service sont actuellement traités par le centre de données Coriolis. Ils ont été déployés sur une grande surface géographique (Atlantique Sud, Atlantique équatorial, Atlantique Nord, Golfe de Guinée, Pacifique S.O, Golfe du Bengale), et sur des supports variés : campagnes océanographiques (80%), déploiement d’opportunité (voiliers et marine marchande). De nouveaux flotteurs seront déployés en 2017.

Nouvelle génération de flotteurs Argo

Les développements de nouveaux flotteurs et l'amélioration des flotteurs existants sont quasiment menés à terme. Bon nombre ont été déployés, ce qui a permis aux chercheurs de mener des expériences scientifiques pilotes en mer Méditerranée, en Arctique et dans l'Atlantique Nord. Elles vont se poursuivre et évoluer vers l’exploitation scientifique des observations et leur apport pour la compréhension du rôle de l’océan sur le climat.

Flotteurs Deep Arvor
Mise à l'eau d'un Deep Arvor. Source Ifremer

Flotteurs avec capteurs biogéochimiques en Mer Méditerranéenne

Concernant les flotteurs avec capteurs biogéochimiques en Méditerranée, plus de 80% ont été déployés notamment lors de campagne BioArgoMed en 2015, spécifiquement dédiée au déploiement et à la récupération des flotteurs NAOS.

Capteurs biogéochimiques en Méditerranée
Positions des profils des flotteurs NAOS en mer Méditerranée (points blancs : dernière position disponible; points verts : flotteurs toujours opérationnels ; points rouge : flotteurs perdus ; points bleu : flotteurs récupérés).

5482 profils (dont 3202 de NO3/O2) ont été collectés, depuis novembre 2012. Leur exploitation a permis de progresser dans la connaissance et a donné lieu à plusieurs publications.

Flotteurs biogéochimiques en Arctique

Le 9 juillet 2016, les premiers flotteurs adaptés aux conditions arctiques (flotteurs Pro-Ice) ont été déployés en Baie de Baffin depuis le brise-glace canadien Amundsen dans le cadre du projet GreenEdge dont l'objectif est de comprendre les dynamiques du bloom phytoplanctonique de printemps, de déterminer son rôle dans l'océan arctique et les conséquences pour les populations.

Flotteurs Naos en Arctique
Trajectoires des quatre flotteurs depuis leur largage jusqu’à leur plongée hivernale le 1er novembre 2016. Source Naos.

Cinq flotteurs avec capteurs biogéochimiques ont été déployés, 4 en mer de Baffin et un en mer de Labrador.
Ces flotteurs Pro-Ice sont équipés de capteurs CTD (conductivité, température et profondeur), d’oxygène dissous, de fluorescence de la chl a (chlorophylle), de fluorescence du CDOM (matière organique dissoute), de la rétro-diffusion des particules, et de nitrate (deux flotteurs sur quatre).

Flotteurs profonds avec capteurs d'oxygène Atlantique Nord

L’océan profond (au-dessous de 2000 m) reste à ce jour encore mal connu faute de moyens d'observation. L'existence de profileurs Deep-Arvor capables d’échantillonner les 4000 premiers mètres de la colonne d’eau va permettre de disposer de données et de remédier à ce manque.
De nombreuses questions se posent sur la circulation profonde moyenne et sa variabilité, sur la variabilité interannuelle, décennale et à long terme des masses d’eaux profondes et leur rôle sur le stockage de chaleur océanique et l’augmentation du niveau de la mer et plus généralement sur le rôle de la dynamique océanique dans la pénétration et la propagation dans l’océan profond des anomalies climatiques.
L'existence de flotteurs profonds permet d'avoir une meilleur estimation du rôle de l'océan dans l'élévation du niveau de la mer en accédant à la composante thermique profonde. Leur capacité de mesurer la concentration en oxygène dissous met en place une surveillance globale de la concentration en oxygène dans l'océan afin d'évaluer l'impact du changement climatique sur la dynamique océanique et les écosystèmes et pour mieux fermer le cycle du carbone.
Trois zones de déploiement privilégiées des Deep Arvor ont été déterminées dans le cadre d'une stratégie européenne : l’océan Atlantique Nord, l’océan Austral et la mer Méditerranée.
D'ores et déjà, cinq flotteurs Deep-Arvor, équipés d’un capteur d’oxygène dissous, ont été déployés dans le gyre Subpolaire Nord Atlantique . Trois d’entre eux ont été mis à l’eau simultanément dans la zone de fracture Charlie-Gibbs (CGFZ) au cours de l’été 2015 (campagne RREX), tandis que les deux autres ont été largués dans l’Est du bassin d’Irminger au cours de l’été 2016 (campagne BOCATS). Ces déploiements ont conduit à l’acquisition d’un jeu de données de température, de salinité et d’oxygène dissous à haute fréquence (dix jours), unique en profondeur (> 2000 m). ces jeux de données de haute qualité ont déjà conduit à des résultats remarquables.

Déploiement des Deep-Arvor en Atlantique Nord

Trajectoires des trois flotteurs Deep‐Arvor‐O2 déployés dans la Zone de Fracture Charlie‐Gibbs (CGFZ) en juillet 2015 et des deux flotteurs déployés dans l'Est du bassin d'Irminger en juillet 2016, comparées à la circulatioon profonde du Gyre subpolaire Nord Atlantique (carte de gauche, Daniault et al., 2016) dans laquelle les flotteurs dérivent. Les flotteurs noir, marron et rouge communiquent toujours et transmettent leurs données tous les dix jours, tandis que les flotteurs vert et violet ont cessé toutes communicationons (mise à jour le 21 décembre 2016).Source NAOS.

Pour plus de détails sur l'ensemble de ces travaux consulter la News letter NAOS de janvier 2017.

Conclusion

Sonder en profondeur les océans, les scruter en permanence était un rêve d'océanographe. Il a commencé à se réaliser il y a 10 ans quand le réseau Argo est devenu opérationnel, résultat d'une coopération internationale sans équivalent. C’est le premier réseau mondial d’observation in situ des océans en temps réel, le complément indispensable des mesures satellitaires permettant aux scientifiques d’observer, comprendre, prévoir et donnant les éléments à la société pour agir. Avec NAOS, la structure Euro-Argo Eric, ce réseau est pérennisé.

Participants au programme NAOS

Les partenaires de ce programme sont : Ifremer, UPMC, CNRS/INSU, UeB, Shom, CLS, nke.
Les laboratoires participants : LOV (Laboratoire d'océanographie de Villefrance), LOCEAN (Laboratoire d'Océanographique du Climat), LOPS Laboratoire d'Océanographie Physique et Spatiale., département RDT (Ifremer Recherches et Développements Technologiques) , UMI Takuvik

En savoir plus

Le réseau Argo

Le projet NAOS

Les News letters de NAOS

News letter NAOS de janvier 2017

News 2014 : Euro-Argo ERIC, Une infrastructure de recherche européenne pour l'observation des océan

Journal Mercator Océan. Numéro spécial Euro Argo